PATRIMOINE ARCHITECTURAL
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Architecture traditionnelle et vernaculaire.
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Les rues : le pavage
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Dans son étude
consacrée à Gruissan, publiée dans le bulletin de la
Commission Archéologique de Narbonne en 1916, Julien Yché
nous parle de l'état des rue du village : |
" A en juger
par son état actuel, il est facile de se représenter les conditions
dans lesquelles se trouvait le village quand à la viabilité.
Ses rue si étroites, surtout autour du château,
n'étaient qu'une succession de fondrières et de cloaques.
Dans les ruisseaux sans écoulement faute d'eau courante, croupissaient
les eaux ménagères mêlées aux immondices, jusqu'à
ce que de violentes pluies les chassent à l'étang. |
En mai 1795, dans
une délibération relative à la voirie, la Municipalité
proteste contre la malpropreté excessive du village, ordonne un balayage
général et l'enlèvement des ordures, mais les habitants
se souciant fort peu d'obéir à ces prescriptions, elle dut
les y forcer. Le nom expressif de "manjo-fango", mangeur de boue,
donné aux Gruissanais par les habitants des localités voisines,
prouve suffisamment l'état gangeux de leur bourg." |
En 1805 rien
n'a changé, pour preuve la délibération du 17 thermidor,
suite à une pétition de plusieurs habitants : |
" Personne
d'entre nous ne peut disconvenir que dans la plupart des rues du bourg,
les eaux qui s'écoulent des éviers restent stagnantes et s'y
corrompent d'autant plus vite qu'elles ont servi à laver le poisson.
Ces eaux exhalent jusque dans les maisons des odeurs fétides qui
font craindre pour la santé des habitants et il est à appréhender
que ces miasmes impurs n'occasionnent des maladies épidémiques
dans le bourg. Quelle que soit la surveillance de la Mairie, il n'est pas
possible de remédier à ce danger sans faire à nouveau
paver les rues. L'ouvrage étant
réalisé depuis un grand nombre d'années et les étangs
qui entourent la commune s'étant relevés, il faut nécessairement
que les rues le soient aussi un peu afin que les eaux trouvant leur pente,
puissent s'écouler dans les étangs." |
" Devant
l'urgence de ces travaux et en accord avec les habitants concernés,
les décisions suivantes sont prises : |
1° toutes les
rues du bourg seront repavées suivant les règles de l'art, |
2° tous les
matériaux pour le pavement seront fournis par les propriétaires
des maisons et chacun selon ce qui sera nécessaire pour la partie
de la rue correspondante à sa maison, |
3° la main
d'oeuvre sera donnée suivant les lois aux rabais et à celui
qui fera la condition meilleure,
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4° chaque particulier
payera entre les mains de la Commission des Travaux Communaux, le montant
de la main d'oeuvre qui le concernera au prix où l'adjudication aura
été faite par mètre, |
5° si quelque
propriétaire était assez peu raisonnable pour se refuser à
fournir les matériaux et le montant de ce qui sera dû à
raison de la main doeuvre, il y sera contraint par la voie des garnisaires,
ainsi que pour les sols additionnels communaux, |
6° que les
fonds nécessaires pour le pavement des places et autres lieux concernant
la commune seront pris sur les sols additionnels communaux de la présente
année. |
Le Maire
et les Membres de la Commission des Travaux de la Commune sont autorisés
en ce qui les concerne à mettre à exécution la présente
délibération." |
Ces travaux durèrent
plusieurs années, car toutes les rues étaient à repaver. |
En 1830, le Maire
déclare : "Le pavage des rues de cette commune est presque terminé,
chacun de mes administrés se fait un vrai plaisir de payer la partie
de cette réparation en face de sa maison, mais le pavage de la place
publique ainsi que quelques autres endroits se trouvant à la charge
de la commune, il nous reste d'en assurer le paiment. Les fonds disponibles
de la caisse municipale étant insuffissants, on va créer un
rôle de redevances qui renfermera toutes les parcelles de terre ainsi
que les emplacements de maisons usurpés sur le terrain de la commune." |
Une délibération
deux ans plus tard, nous donne tous les détails du compte du pavage,
et des lieux pavés aux frais de la commune : l'entrée de la
Grand Rue dont le tiers est payé par la mairie à cause de
sa largeur extraordinaire, la Place aux Herbes, le devant de l'église,
le devant du presbytère, devant la maison commune, la place entre
Bouis et Ducassou, deux traverses qui recevant les eaux de pluie n'ont pu
être pavés différemment qu'aux frais de la commune,
les marches pour monter au Pech du Château. |
Place Gambetta (photo prise
en 1943 par un soldat allemand)
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Voici le détail
des frais pour le pavage de l'entrée de la Grand Rue (en francs)
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Déblais :
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36 journées d'homme à 1,75 frs l'une................................................................. |
63,44 frs |
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9 journées de femme à 0,75 frs l'une.................................................................. |
06,75 frs |
Cailloux : |
12 journées de charette à 5 frs l'une................................................................... |
60,00 frs |
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50 journées de femme pour ramasser et charger
les cailloux à 0,75 frs l'une......... |
37,50 frs |
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Louage d'un chariot pendant 12 jours................................................................. |
12,00 frs |
Sable : |
2 journées de charette à 4,50 frs
l'une................................................................ |
09,00 frs |
Trottoir : |
Achat de pierres et port .................................................................................... |
07,00 frs |
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Façon 6 jours d'ouvrier à 1,75 frs
l'une.............................................................. |
10,50 frs |
Pavage : |
260 mètres à 34 frs l'un, dont 30
frs pour les paveurs et 4 frs pour le géomètre... |
88,50 frs |
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Total ...........
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294,69 frs |
La dépense
pour le pavage des lieux publics du village s'élève à
710,86 francs. |
"Cette somme
sera prise sur le capital de la vente des biens communaux qui vient d'être
autorisée par ordonnance royale". |
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Cf : Gruissan d'Autrefois n° 204. Archives Municipales.
F. G. |