PATRIMOINE ARCHITECTURAL
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Architecture tradidionnelle et vernaculaire
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Comment
reconnait-on la plupart de nos charmants villages? |
A leur clocher
bien sûr ! |
Depuis des
siècles les cloches ont rythmé la
vie de nos aïeux, leurs activités, leurs pauses, les jours et
les nuits, les dispersant ou les rassemblant comme une mère poule
avec ses petits. |
La position
du soleil dans le ciel servait de repère à l'homme primitif. |
Grâce
à l'alternance du jour et de la nuit et à la succession des
saisons, il avait déjà une notion du temps. |
Puis les premiers
hommes civilisés trouvèrent mieux : au lieu d'observer le
soleil, il mesuraient le déplacement de l'ombre d'un objet sur le
sol où des repères permettaient de diviser la journée
en tranches. |
A noter que
l'un des plus anciens rendez-vous galants de la littérature le fut
en ces termes : "lorsque ton ombre Bérénice atteindra
seize pieds, Amaris t'attendra dans le bois d'oliviers." |
Les Grecs
perfectionnèrent la clepsydre ou horloge à eau, connue déjà
en Chine et en Egypte, puis le sablier. |
Les Romains
empruntèrent les cadrans solaires aux Egyptiens et les imposèrent
à leurs conquètes. |
Ces dispositifs
étaient peu fiables et jusqu'au XIIIème siècle ce sont
les carillons des églises qui rythment les heures. |
Elles suivaient
la course du soleil et étaient plus courtes l'hivers que l'été. |
L'horloge
mécanique à échappement fait son apparition au XIIIème
siècle. |
Dans les
villes sont construites de grandes tours pour les abriter. |
Plus tard,
c'est pour rendre plus sûre la navigation que les horloges se perfectionnent
: pour connaître la longitude d'un lieu d'observation, il est alors
nécessaire d'avoir l'heure précise. |
D'où
la nécessité pour tout navire, d'avoir à son bord,
un chronomètre (aujourd'hui parmi les instruments de secours). |
En 1698
sur le clocher de Gruissan existe une horloge dont l'état de vétusté
nécessite de grosses réparations : elle ne sonne plus. |
Cet appareil
fonctionne donc depuis plusieurs années. |
En examinant
les raisons invoquées pour accélérer les réparations
et justifier les sommes importantes investies, nous voyons le rôle
essentiel joué par cet instrument dans la vie de nos aëux. |
En 1732
le Conseil Général de la Commune sous la présidence
de Sieur Camp, Consul, signale : "qu'il est nécessaire de recommander
l'horloge pour la facilité des pêcheurs et autres personnes
qui sont obligés de se lever à certaines heures de la nuit
pour vaquer à leurs affaires". |
En 1818
les raisons sont encore plus précises. |
Monsieur
le Maire parle "de la majeure partie des administrés obligée
de se rendre journellement et nuitamment sur le rivage de la mer pour aller
chercher le poisson de la pêche au large et des traînes que
nos marins font en mer pour se subsister avec leurs familles, qui dans ce
bourg est l'unique ressource". |
Les membres
du Conseil reconnaissent "
- que les habitants ne peuvent se passer d'une horloge attendu que plusieurs
chasse-marée et notamment les femmes sont obligés de
se rendre de jour et de nuit sur les rivages de la mer pour y acheter du
poisson pour porter dans différentes communes du département
et qu'elles règlent leur départ à des heures fixes
par la sonnerie de l'horloge ;
- que les marins qui font porter journellement du vin en mer pour leur boisson,
sont obligés de prendre des congés du receveur buraliste de
ce bourg qui n'accorde qu'une heure pour l'enlèvement de leurs caves
à leur bord et qu'ils se trouveraient exposés à des
amendes n'ayant point d'horloge pour fixer l'heure d'enlèvement des
boissons". |
Les Gruissanais
vivaient surtout aux XVIIIème et début XIXème des ressources
de la mer ! |
L'entretien
de l'horloge coûtait fort cher à la communauté. |
Chaque année
une somme était réservée au "remonteur d'horloge",
charge qui existait déjà en 1698 et n'a été
supprimée qu'en 1948. |
Les horlogers
étaient peu nombreux. |
En 1719 c'est
Monsieur Mongruel, fermier horlogeur de la ville de Narbonne, qui réalise
les réparations moyennant la somme de 35 livres, avec charge de l'entretenir
un an. |
La Commune
ne possède pas cette somme. |
Monsieur Jean
Benoît, prètre et recteur, en fait l'avance. |
Les réparations
de 1727 nous enseignent sur la manière dont sont traitées
les dépenses de la Commune. |
"L'horloge
ayant bessoin de faire des réparations considérables étant
restée sans sonner les heures depuis six mois, les Consuls ont fait
procéder au devis sans avoir trouvé d'autres prétnedants
au réparations que Pascal Fuet, Maître serrurier de Narbonne,
qui aurait offert de faire les travaux pour la somme de 36 livres et de
la mettre en bon état et de l'entretenir une année à
ses frais et dépens, sur laquelle offre personne n'aurait daigné
moins dire quelques diligences que Messieur les Consuls ayant fait pour
trouver le moins disant et que l'horloge restant sans sonner est
en danger de se gâter par la rouille, il ont convoqué le Grand
Conseil (formé du Conseil du village et des administrés les
plus imposés en nombre égal) qui donne son accord." |
En 1732
il est dit : "depuis longtemps l'horloge de la Commune étant
en mauvais état, aurait été baillée à
réparer à des serruriers de la ville de Narbonne qui bien
loin de la racommoder, l'aurait gâtée en sorte qu'elle ne sonne
plus. |
Le Sieur Jean
Vadel maître horloger de Tuchan et son fils, pensionnés pour
les horloges des fortifications de sa Majesté en Roussillon auraient
offert de faire les réparations mentionnées au devis et autres
au cas où en la démontant il s'en trouverait de nécessaire,
et la mettre en parfait état de sonner pour la somme de 55 livres"
que la ville empruntera. |
Durant la
Révolution l'horloge ne fonctionne pas. |
En 1795 une
cloche est gardée dans la commune pour sonner l'heure, le tocsin
(sonnerie de cloches civile pour alerter la population d'un danger imminent
tel qu'un incendie, une invasion, une catastrophe naturelle, un naufrage,
mais aussi pour rassembler la population en urgence), etc. ... |
Voici qu'en
1818 l'horloge est en panne. |
On s'adresse
cette fois au Sieur Boucajai horlogeur en gros volume de la Commune de Lézignan,
car "il nous a offert l'horloge qui est déjà placée
moyennant la somme de 600 francs, on demande à Monsieur le Conseiller
d'Etat, Préfet de l'Aude de faire tout les agissements nécessaires
afin que la Commune soit autorisée à acheter l'horloge qui
est déjà sur le clocher pour la somme de 600 francs qui sera
extraordinairement imposée au centime et franc des contributions
foncières, personnelles et mobilières et portes et fenêtres
de l'année 1819 pour être payé le Sieur Boucajai dans
deux ans sans intérêt la moitié chaque année." |
En 1875
il faut acquérir une nouvelle horloge. |
"Le clocher
de l'église ne possède aucune chambre propre à recevoir
cet appareil de précision, il faut voter une somme pour la construction
d'un réduit propre à mettre le système à l'abri
des intempéries, de l'air et de la poussière." |
La dépense
totale sera de 2 500 francs ainsi divisée : 1 800 francs pour l'achat
de l'horloge, 500 francs pour la refonte d'une cloche devant servir à
la sonnerie et 200 francs pour la construction d'un réduit. |
C'est Monsieur
Dorléans Strebet, horloger mécanicien à Paris qui est
chargé de cette opération. |
Par la suite
on ne parlera plus de l'horloge ; peut être le village étant
moins pauvre, l'entretien de l'horloge causera moins de soucis aux élus. |
Plus tard
Gruissan aura trois horloges : sur son clocher, sur la façade du
"Cagé des Capitaine" et l'horloge électrique lumineuse
sur le fronton de l'Ecole des Garçons, offerte par Monsieur Louis
Rachou. |
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Cf : Gruissan d'Autrefois n°134 - G.R.A.S.G.
Archives Municipales de Gruissan - Archives Départementales - Md
TAUSSAC
F. G |